Le 8 septembre, c’est la journée internationale de l’alphabétisation. Dans notre société dominée par l’écrit, on oublie qu’il y a des personnes adultes qui ne savent ni lire ni écrire des écrits, ou à peine, et en tout cas pas suffisamment pour être capable de se débrouiller avec des écrits de la vie quotidienne. Ce n’est pas si rare qu’on pourrait le penser : aujourd’hui, en Belgique, il s’agit d’1 personne sur 10. Et chaque année, Lire et Ecrire fait campagne pour sensibiliser à cette réalité qui peut être difficile à imaginer.

Mais justement, qu’imaginons-nous ? Quelle représentation nous faisons-nous de ces personnes analphabètes ? Il s’agit d’une différence invisible : le pays d’origine, l’âge, le sexe, la classe sociale … rien de tout cela ne permet d’indiquer d’une personne maîtrise l’écrit ou non. De plus, bien des personnes dans cette situation préfèrent cacher ce qu’elles considèrent comme une caractéristique honteuse… Si cela les prive d’une aide qui leur serait parfois nécessaire pour éviter de se trouver dans des situations compliquées, cela évite aussi qu’on les catégorise uniquement comme « analphabètes », oubliant tout ce qu’elles sont à côté, cette multitude d’autres aspects de leur personnalité.
«Le discours dominant sur l’illettrisme est marqué par la souffrance et la « détresse linguistique globale », auxquelles s’ajoute parfois l’image d’un illettré plongé dans un « isolement social ». Doit-on accepter cette représentation de l’illettrisme ? Circonspecte, notre posture sociologique invite à renverser le problème en ne considérant plus la personne « illettrée » uniquement sous l’angle de son déficit mais aussi sous celui de ses capacités d’action et d’intégration sociales… .»
(Agnès Villaise-Duponchel et Joël Zaffran in Revue française de sociologie, année 2001, 42-4, pp. 669-694 – Texte intégral : Résistance à l’infériorisation sociale chez les personnes en situation d’illettrisme.
Et dans la littérature, comment représente-t-on la personne analphabète ?
En mars 2003, sous la plume de Catherine Bastyns, le Journal de l’Alpha ouvrait une rubrique intitulée Litteralpha. Au cours des années suivantes, cette rubrique fut alimentée par les coups de coeur de nombreux formateurs.
Catherine Bastyns explique : « Il faut le repréciser : une catégorie telle que les analphabètes n’existe pas. En rangeant sous ce label ceux qui, parmi mille et une autres caractéristiques ont celle de ne savoir ni lire, ni écrire (ou à peine) on ne fait en réalité rien d’autre que de les rendre ces personnes plus différentes qu’elles ne le sont. Plus différentes mais en réalité privées du droit d’être différenciées c’est-à-dire reconnues à travers leurs autres traits qu’ils soient individuels ou collectifs » (Texte intégral dans le Journal de l’Alpha n°133, 02-03/2003 )
Notre centre doc a réuni dans une bibliographie consultable en ligne quelques-uns de ces titres sous le descripteur « analphabétisme dans la littérature ». Dans nos rayons, ces ouvrages sont facilement reconnaissables à leur étiquette jaune « litteralpha » apposée sur leur tranche.
Il s’agit bien ici d’ouvrages de fiction. Les témoignages de personnes illettrées sont quant à eux réunis sous le descripteur « témoignage d’apprenants » et font l’objet d’autres réalisations.